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Concours d'écriture de nouvelles pour les 1ère pro

07/02/2024

Concours d'écriture de nouvelles pour les 1ère pro

Les élèves de 1ère professionnelle ont participé au concours de nouvelles organisé par les médiathèques de Romans Valence Agglo en novembre et décembre derniers. Tous ont rédigé un texte de 8500 caractères durant les cours de français. Exercice difficile, pourtant ils y sont arrivés et certains textes figuraient parmi la sélection officielle. 

Pour valoriser leur travail, la professeure de français, Mme Beaume-Begot a décidé d'organiser au sein du lycée une remise des prix le jeudi 1er février en présence de M. Faurie (bibliothécaire), M. Leclercq (chef d'établissement) et Mme Grasse (professeure documentaliste). Les 3 lauréats, Yanis, Lalou et Ysia-Lou ont reçu en récompense un bon d'achat Leclerc, financé par l'APEL.

Encore une fois, nous les félicitons.

Vous pourrez lire ci-dessous la nouvelle arrivée en 1ère place.

                                                                                                   

 

 

 La musique dans les oreilles, le monde pouvait bien s’effondrer. C'est l'impression qu'elle avait eu les dernières fois où sa playlist avait réconforté son cœur brisé. Mais aujourd'hui le vide était trop grand. Elle avait ce regard vide des gens qui n'arrivent plus à pleurer.

Ce matin d'automne avait l'air si funeste, elle enchaînait la même journée :lever, manger, lycée, coucher.

Ils auraient sûrement compris ce qu'était le mal être s'ils avaient vécu cela.

 

–    6h30: eh Lou!! lève toi, dépêche! t'es pas capable de mettre un réveil?

 

Elle ne répond pas , c'est sa mère. La mère de Lou rejetait toutes ses colères sur sa fille depuis que son petit frère, Eliott, était porté disparu. Parfois il lui manquait, la maison paraissait silencieuse maintenant. Eliott avait toujours été le préféré, alors peut-être que son absence serait moins compliquée à oublier.

  Plus les jours passaient et plus le réveil était dur : Nouvelle journée, nouvel enfer.

 

                 - 12h: Salut les filles! Vous allez où?

                 - Oh Lou..On va manger au resto à midi

                 - Ah bon... mais vous ne m’aviez pas prévenu.

                 - Oui, c'était entre nous, désolée.

Le cœur un peu plus en miette que la veille, elle regarda ses amies partir. Pourquoi n’était-elle pas invitée ? Un midi de plus assise seule sur les tables sales du lycée. La musique dans les oreilles, le brouhaha de la cafétéria ne l'angoissait plus autant, mais les regards moqueurs des camarades restaient bien présents. Si seulement elle pouvait disparaître.

 

                 -15h10 : Lou, 3/20. Comme d'habitude, c'est décevant! Quand vas-tu réviser?

  

La vérité, c'est qu'elle avait tout donné à cette évaluation. La situation devait paraître drôle puisque les autres élèves se permettaient d’en rire. Elle se dénigrait elle-même au quotidien, mais finalement ce n'était pas nécessaire, puisque les autres le faisaient pour elle.

Elle retient ses larmes.

 

A  peine sortie des cours, le premier réflexe de Lou était de mettre ses écouteurs, la vie avait une allure plus douce en musique. Les nuages s'étaient emparés du ciel et la nuit ne tarderait pas à tomber.

Sur le chemin du retour, elle passa devant ce fameux magasin , où elle avait vu son petit frère pour la dernière fois, cela faisait maintenant 2 ans.

  

             - Oh non Lou ! J'ai pas envie de faire les courses. Je peux t'attendre là ?

             - Mmm d'accord , mais tu restes assis ici et tu parles à personne ! C'est compris Eliott ?

 

 En sortant du magasin personne n'attendait Lou, que s'était-il passé ? Elle ne s'était absentée que 10 minutes seulement.

La culpabilité lui donnait envie de vomir chaque fois qu'elle passait à cet endroit.

Et pourtant , elle avait espéré que sa mère s’occupe plus d'elle maintenant que Eliott ne les encombrait plus.

Elle reprit sa route vers la maison, entourée des feuilles mortes qui longeaient le trottoir.                                 

 

                       -17h: Putain Lou ! c’est quoi cette note en maths, tu va finir comme ton père !                

                                                                                                                                                               

Le père de Lou était un pauvre miséreux selon sa mère, il n’avait jamais était présent pour elles, à part dans les moments où les coups le détendaient. Chaque geste brusque, chaque cri lui rappelle ces sombres souvenirs que lui a laissé son paternel.

Il y en a qui sont faits pour vivre avec un père, Lou n'avait jamais passé un seul jour de sa vie avec sa présence. Tout ce qu'il lui avait promis, elle y avait toujours cru. Mais elle n'a jamais eu cette relation père-fille, ni attention, ni complicité, ni une once d'amour, ni même avoir l'impression d’exister à ses yeux. On doit sûrement être heureux d'avoir un père présent, mais Lou n'avait jamais rien eu, à part son absence.

Elle courut se réfugier dans sa chambre.

 

          -19h20: Maman ?

   Aucune réponse, elle poussa la porte du salon : sa mère était étalée sur le sol. Sans même avoir l’air étonné, elle l'enjamba. C'était une habitude maintenant. Depuis qu' Eliott n’était plus là, l’alcool lui permettait d'oublier sa peine. Lou avait bien essayé de l'aider, mais en vain. On ne peut pas aider quelqu'un qui refuse d'être sauvé.

 

                     -21h: Allô Lou? On t'attend au bar, qu'est-ce que tu fous?

                     -Oui, désolée, je suis là dans 5 minutes

 Les yeux sur son écran jusqu'à voir fluo, les larmes au bord des yeux, elle prit une grande inspiration.Elle se dépêcha de se préparer. Se faire belle faisait parti des choses qui lui changeaient les idées. Seule face à son miroir, elle appliqua délicatement son mascara, en espérant qu'il n'aurait pas de raison de couler ce soir.

 

                      -21h40: Salut tout le monde, vous avez déjà commandé?

                      -Oui, tu en as mis du temps! On est sur le point de partir.

 

Quelle terrible douleur. Elle les regarda partir et mit ses écouteurs, la musique avait toujours retenu ses larmes dans les moments où son cœur cédait. Elle resta assise, seule, sur cette terrasse de bar comme si elle attendait quelqu'un. Le regard perdu, comment deviner ce qui l’animait ?

   

                        -22h: Maman : appel entrant.

                        -Lou tu me fais vriller, t'es où encore? Ce n’est même pas la peine de rentrer ce soir,

                         va vivre chez ton père!

 

Sans même avoir le temps de prononcer quelques mots, l'appel pris fin. Ce soir, c'était trop.


La nuit tombait. Assise sur cette terrasse, le froid lui gelait ses doigts fins posés sur ce verre de whisky qui lui réchauffait la gorge.

La place était encore bien animée.

Ce groupe de personnes qui valsaient sur les notes du violon d'un mendiant, avaient l'air si heureux d’être là, pourquoi pas elle? 

Elle avait le vertige en voyant tout le chemin qu'elle devrait encore accomplir, elle était à bout de forces.

Elle regarda son verre déjà vide, elle en recommanda un, puis deux, et même un cinquième.

Cela faisait beaucoup d'alcool pour la jeune fille qu'elle était, mais dans ce moment si lamentable elle avait besoin de quelque chose de plus fort que la musique.

 

                      -00h50: Excusez-moi mademoiselle, nous allons fermer, voulez-vous que l'on vous appelle un taxi?

 

Elle se leva sans décrocher un mot, peu consciente de ses actes, elle marcha.

La place s'était vidée et le mendiant rangeait son violon. Etait-il aussi malheureux qu'elle?

 

Lou n'avait jamais parlé de ses problèmes à quiconque, tout le monde la pensait heureuse. Et pourtant, elle se demandait si elle l'avait déjà été. La seule personne qui avait entendu ses douleurs était son premier copain ; il avait l'air tellement amoureux, qu'elle l'aurait suivi au bout du monde. Mais il avait prétendu ne jamais l'avoir aimé après leur séparation. C'est marrant comme les gens peuvent avoir l'air fou amoureux, en ne l’étant pas du tout, c'est quelque chose qui doit être facile à imiter .Il avait été son seul confident, maintenant elle était prisonnière de ses  doutes. Le genre de problème qui casse un cœur.

 

Et tous les soirs, allongée dans son lit, le diable lui rendait visite. Elle ne voulait plus de toutes ces pensées noires. Son seul désir était d’être heureuse. La pleine lune éclairait ses pas et la musique d'une fête lointaine était à peine perceptible.

 

                        -1h15: Eh toi! Viens là!

 

 Un groupe de garçons adossés à un mur l'interpelle. Leurs regards féroces se posent sur son corps. L’enfer des ruelles sombres lui donne envie de s’enfuir. Ils commencèrent à la suivre. Elle espérait sincèrement que cette journée ne finirait pas aussi mal que ça.

Elle court.

 

 Le vent lui tape les joues et la pluie l'accompagne dans sa course. Elle saute dans sa voiture et s'enferme. Elle ne sait pas si la troupe a couru derrière elle, mais elle ne prends le temps de souffler que lorsque sa voiture se met à rouler.

Une fois la tension redescendue, elle réalisa. Cette vie était si dure.

La souffrance dans sa poitrine était  puissante, trop puissante. Elle cria de douleur.

 

Ce soir, elle roulait vers l'inconnu. Avait-elle la force de commencer un nouveau jour?

A travers son pare-brise, la lune éclairait ses joues humides. Le temps semblait ralentir.

Elle écrasa la pédale de l’accélérateur.

 

La scène était aussi belle que tragique. Et alors que ce virage rimait si bien avec la mort , elle vit cette profonde falaise qui longeait la route. Elle coupa la musique, cette fois les mélodies ne pouvaient plus l'aider. Elle mit un coup de volant.

Le choc fut si brusque. Un silence morbide entourait les sirènes des pompiers.

 

                          -2h: Heure de la mort?

                          -L'horloge de sa voiture s'est arrêtée à 1h30. Elle est décédée sur le coup.

 

Quelle fin tragique. Mon cœur saignerait moins si cette mort n’était pas la mienne.